Jean-Pierre Pinel est subitement décédé en septembre 2022 à l'âge de 69 ans. Solide psychologue clinicien, analyste de groupe et d’institution, Professeur émérite de psychopathologie sociale à l'Université Sorbonne Paris Nord (Paris-13), membre de l'Unité transversale de recherche en psychogenèse et psychopathologie (UTRPP), président de Transition (Association européenne, analyse de groupe et d’institution) et co-rédacteur en chef de la revue Connexions, il était devenu un spécialiste incontesté de la clinique psychanalytique institutionnelle et des transformations contemporaines. Humaniste convaincu, calme et réservé, il savait, dans le respect de chacun, faire avancer les problèmes.
Jean-Pierre Pinel a d’abord travaillé avec des adolescents, notamment en ITEP, en animant aussi des groupes de psychodrame, avant d’assurer progressivement les différentes fonctions de superviseur d’équipe, d’analyste des pratiques ou d’intervenant institutionnel dans de très nombreux établissements dans le domaine de la santé, de l’éduaction ou du médico-social. Il s’est engagé à « Transition », l’institution d’intervention et de formation créée par Jean-Claude Rouchy.
Sa rencontre avec l’Université, André Ruffiot à Grenoble, puis à Lyon Jean Guillaumin, son directeur de thèse, René Kaës surtout, dont il est devenu très proche, a été déterminante. C’est là que nous nous sommes rencontrés et avons partagé projets, soucis méthodologiques et attrait pour une clinique psychanalytique « du 3e type » où on ne pouvait plus penser l’individu comme une simple monade.
Touché par la clinique de l’agir et des adolescents, il a mis en évidence à quel point leurs comportements pouvaient se réverbérer sur les soigants, les équipes par « homologie fonctionnelle » se comportant comme eux. Ce lien indissociable entre pathologie des accueillies et position des « accueillants » a été je crois au cœur de ses interrogations et de son souci thérapeutique. Ouvert aux approches interdisciplinaires, il a su comprendre et analyser le courant de dé-institutionnalisation qui traversent notre société, avec plusieurs notions qu’il a développées sur « la transparence » ou « la position nostalgique mélancolique ».
Ses écrits témoignent régulièrement d’une profonde analyse, clinique, conceptuelle et méthodologique, toujours engagée. Le dernier ouvrage qu’il a coordonné avec Georges Gaillard, « Le travail psychanalytique en institution » (Dunod), est un véritable manuel qui fera date.
Denis Mellier
Psychologue clinicien
Professeur de psychologie clinique et pathologique