« Identités plurielles » ou pluridiversité ? Telle était la question à Lyon les 6 et 7 juin

Actualités professionnelles le 28 juin 2024

 

L’École de Psychologues praticiens de Lyon, organisait, les 6 et 7 juin 2024, sous l’égide de Christian Heslon, directeur de l’école, un colloque au titre pour le moins ambitieux, mais très actuel : "Les identités plurielles des psychologues".

 

Cette manifestation[1] rassemblait une centaine de personnes, dans le cadre d’un colloque ô combien nécessaire, compte tenu de l’intérêt porté aux psychologues ces derniers mois. Intérêts hétérogènes, parfois confus, souvent inquiétants.

Ce phénomène n’est pas nouveau. Depuis des décennies, les psychologues peinent à faire reconnaître leur diversité, comme l’a souligné Alain Blanchet, président de l’EPP. Sans doute a-t-il fallu de la diplomatie pour rassembler en ouverture des journées les principales organisations professionnelles et syndicales[2], malgré leurs orientations parfois divergentes. L'objectif étant de saisir pleinement la diversité et les nuances des psychologues sur des questions brûlantes, notamment leur identité professionnelle et les ajustements essentiels de leurs pratiques basés sur des théories solides et valides.

Les organisations sont revenues sur l’historique de leur création, et les orientations principales de leurs revendications et exigences à de multiples niveaux de leurs préoccupations professionnelles. Elles ont aussi insisté sur ce qui les distinguaient et notamment leurs stratégies d’intervention ou de mises en lumière des revendications. Certes, les divergences sont nombreuses, mais plutôt que de mettre l’accent sur celles-ci, la volonté était clairement de mettre en évidence des lignes de base, voire de force qui révèlent sinon un travail en commun, ou tout au moins des convergences de lutte concernant les aspirations des psychologues.

L’originalité du positionnement de cette table ronde, a permis de donner le ton à l’ensemble du colloque, certes marqué par les préoccupations actuelles mais aussi et surtout par les ouvertures engagées par les psychologues, ceci dans les différents axes proposés par les organisateurs : la « pluriversité » des psychologies d’aujourd’hui, les identités plurielles du psychologue, les relativités des conceptions théoriques et pratiques - quelles psychologies pour quels sujets et quelles sociétés à venir ? - et les parcours variés des psychologues tout au long de leur vie.

Comme un fil rouge tout au long de ces deux journées, la question centrale était de démontrer la richesse des approches que proposent les psychologues dans leurs pratiques, mais aussi inévitablement les risques de fragmentation engendrés par l’éventail de ces mêmes pratiques. Et aussi l’émergence de propositions « marchandes » dans les offres actuelles aux psychologues, où l’estompage de l’autonomie est souvent de mise, au bénéfice d’une libéralisation accrue au risque de perdre précisément ce qui fait l’originalité de la profession et son apport essentiel, là où la déontologie des psychologues est souvent mise à mal.

Les interventions ont permis l’analyse des différents champs et disciplines avec leurs inflexions contemporaines telles que les mutations actuelles vers de les nouvelles pratiques ce qui pose aussi la question des formations plus que jamais à l’ordre du jour et aussi à la diffusion de la psychologie. Des témoignages riches à la fois d’expériences et démontrant que le haut niveau de qualification et les spécificités des enseignements à la psychologie pouvaient permettre à certains de travailler en dehors de la profession mais avec des acquis venant de leur formation qui leur donnaient des atouts indéniables.

Mais l’objet du travail du psychologue selon le code déontologie n’est plus la conduite mais la personne dans sa dimension psychique. Encore faut-il s’accorder sur ce qu’on entend par « dimension psychique de la personne » comme l’a souligné Albert Ciccone dans sa magistrale intervention où il a tenté de définir des invariants : appartenance de la psychologie aux champs des sciences humaines et sociale, son ancrage transversal essentiel, et la référence au titre de psychologue.

Ponctués par des interventions et des tables rondes concernant aussi bien les nouvelles formes d’emploi, le risque d’uberisation de la profession, les avancées entre fascination et répulsion face à l’impact de l’IA sur les psychothérapies, ces deux journées d’une densité indéniable et d’une grande richesse de contenu auront permis d’avancer sensiblement dans les réflexions critiques et constructives autour de notre profession.

Patrick Conrath

 

[1] Parmi les intervenants : Albert Ciccone, Christian Heslon, Katia Kostulski, Ueli Kramer, Conrad Lecomte, Thomas Rabeyron, Benoît Schneider, Cyril Tarquinio,...

[2] AEPU, Ufmict CGT, FFPP, Manifeste Psy, SFP, SNP.

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