Ces dernières semaines, l’annonce concernant les travaux d’un neurochirurgien italien font fortement réagir la communauté scientifique. Tel le mythe de Frankenstein, il n’est ni plus ni moins question que de greffer une tête sur un corps étranger.
Sergio Canavero, neurochirurgien italien, se fait depuis ces dernières années le chantre de la greffe de tête. Du stade de promesses, il était passé à l’action en réalisant, en 2016, ce type d’intervention sur un singe. L’animal n’avait cependant pas repris conscience.
Le 17 Novembre dernier, le même Sergio Canavero franchissait une étape supplémentaire en annonçant, lors d’une conférence de presse, avoir réussi la première greffe de tête chez l’être humain. Cette opération, réalisée en Chine avec la collaboration et sous la direction du professeur Xiaoping Ren, avait permis de connecter la tête d’une personne décédée au corps d’une autre. L’opération d’une durée de 18 heures est annoncée par les protagonistes comme un succès. La revue Surgical Neurology International publiait le 17 Novembre un compte rendu de cette opération.
Désireux de ne pas s’arrêter à ce stade, Sergio Canavero annonce déjà quelle sera la prochaine étape ; réaliser la même intervention mais avec la tête d’un sujet volontaire vivant. Cette intervention est annoncée par le spécialiste comme prévue pour le mois de Décembre 2017.
Cette annonce n’a pas manqué de faire réagir de nombreux spécialistes, considérant la différence qu’il peut y avoir entre une intervention sur un sujet décédé (sans saignement donc) et une autre, sur un sujet vivant. Beaucoup sont dubitatifs quant aux chances de survie d’un patient ayant subit une telle intervention. Aucune preuve n’existe quant à la possibilité qu’aurait la moelle épinière de se connecter. De plus, comme pour toute greffe, une problématique de rejet se poserait, mais à une échelle autrement supérieure.
Au-delà de ces aspects techniques, s’arrêter un moment sur une telle intervention pose un nombre vertigineux de questionnements divers. Parle-t-on de greffe de tête ou de greffe de corps ? Qu’en serait-il de la perception de ce corps par un cerveau « étranger » ? La douleur d’un corps se réveillant d’une telle intervention serait elle supportable ?
Mais surtout, et c’est en cela que la communauté scientifique s’émeut particulièrement ; jusqu’où aller pour faire progresser la science ?
Ces questionnements sont fondamentaux, et prouvent une nouvelle fois de la nécessité d’avoir une réflexion globale et éthique sur ce que nous étudions.
Benoit Catel
Pour aller plus loin :
Compte rendu de l’opération, surgical neurology international, 17/11/2017 : http://surgicalneurologyint.com/surgicalint-articles/first-cephalosomatic-anastomosis-in-a-human-model/
Article de France Info, 22/11/2017 : https://www.francetvinfo.fr/sante/un-medecin-annonce-avoir-greffe-une-tete-humaine-sur-un-cadavre-la-communaute-scientifique-s-arrache-les-cheveux_2480379.html